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Interview

Inde : «Il y aura plus de pluies extrêmes à cause du changement climatique»

Selon le chercheur allemand Jacob Schewe, les moussons violentes comme celle qui a provoqué la mort de 410 personnes dans l'Etat du Kerala, ces derniers jours, devraient devenir plus fréquentes.
par Aude Massiot
publié le 21 août 2018 à 18h29

En Inde, des pluies torrentielles ont causé la mort de plus de 410 personnes et poussé plus d'un million d'autres à se réfugier dans des camps humanitaires au Kerala, un Etat du sud du pays. La décrue progressive, rendue possible par l'affaiblissement de la pluie, révèle progressivement les destructions dans cette région luxuriante. Jacob Schewe est chercheur à l'Institut de Potsdam pour la recherche sur l'impact climatique, en Allemagne, il explique comment le réchauffement a pu jouer un rôle dans cette catastrophe.

Comment les moussons sont et seront modifiées par le dérèglement du climat causé par l’homme ?

C’est un sujet sur lequel il existe encore beaucoup d’incertitudes, car c’est un des mécanismes météorologiques les plus complexes de la planète. Nous avons tout de même beaucoup de preuves sur le fait que le réchauffement mondial va exacerber la différence entre la température à la surface des océans et celle sur les terres au printemps. Cela va conduire à un renforcement des vents qui apportent la mousson. Par ailleurs, nous savons aussi que l’air plus chaud garde mieux l’eau, et donc que les précipitations seront plus intenses lors de ces épisodes tropicaux saisonniers. C’est un phénomène déjà remarquable dans les relevés historiques. Par contre, il est encore difficile d’observer un renforcement réel des moussons, car la variabilité naturelle de ces phénomènes est très forte.

Y aura-t-il des différences d’évolution entre les régions ?

En Afrique, certains modèles climatiques montrent une large extension vers le nord de la mousson sur des régions du Sahel, qui reçoivent très peu de pluie. Les autres modèles prédisent seulement une hausse graduelle des précipitations dans les régions habituelles de mousson. Il existe aussi pour l’Afrique une plus forte probabilité d’un changement abrupt de régime de pluie, par rapport au reste de la ceinture tropicale. En moyenne, sur la planète, nous allons voir de plus en plus de précipitations extrêmes à cause du changement climatique.

La mousson arrivera-t-elle plus tôt ou plus tard dans l’année ?

Elle pourrait devenir plus longue et surtout finir plus tardivement. Etant donné qu'elle se nourrit de la chaleur dégagée par les océans, avec le réchauffement mondial elle pourra se maintenir plus longtemps sur les régions concernées. Cependant, il est complexe d'évaluer l'évolution future des moussons, car elles sont couplées avec les phénomènes météorologiques La Niña et El Niño, qui sont eux-mêmes difficiles à prévoir.

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